Les membres du gouvernement français directement impliqués

 
L'année 1952 voit l'échec des négociations directes entre les gouvernements français et tunisiens suivi de la répression : arrestation d'Habib Bourguiba et de tous les leaders nationalistes, départ de Salah Ben Youssef en mission auprès des Nations unies, instauration du couvre-feu et de l'état d'urgence ou interdiction de toute activité politique, actions de ratissages menées par la Légion étrangère, destitution du gouvernement de M'hamed Chenik.

Dans ce contexte, l'UGTT se retrouve en première ligne en assumant la responsabilité de diriger la résistance politique et armée contre les autorités du protectorat. En effet, elle reste protégée par la loi sur les libertés syndicales et le soutien de la CISL, des syndicalistes américains ainsi que des démocrates qui sont alors au pouvoir aux États-Unis.

Leader du mouvement national et chef de la résistance, Hached organise secrètement les groupes d'activistes dans les locaux de l'UGTT pour mener des attaques armées contre les symboles de l'autorité française. Il mène également des actions de grèves et de mobilisations malgré l'arrestation de plus de 20 000 personnes.

Hached voyage en avril auprès de la CISL à Bruxelles et aux États-Unis (Washington et New York) pour porter la voix de la Tunisie au moment où les questions tunisiennes et marocaines sont débattues au Conseil de sécurité. Le gouvernement français se trouve alors acculé à présenter un nouveau plan de réformes. Hached suggère alors au bey de Tunis de réunir un conseil de quarante personnalités représentatives de l'opinion tunisienne afin d'étudier ce plan et de lui présenter leur avis le 2 août ; la réponse est négative avec un rejet dûment circonstancié.

Il devient alors l'homme à abattre en raison du danger qu'il représente pour les intérêts de la colonisation en Tunisie et en Afrique du Nord en général. Dès le mois d'octobre, des officines diverses au sein des services secrets français commencent à étudier divers plans : son éloignement du territoire tunisien, son emprisonnement, sa mise en résidence surveillée voire son assassinat. Pendant ce temps, il fait l'objet d'une surveillance permanente et les menaces se multiplient à travers des tracts signés de l'organisation colonialiste de la Main rouge. Des actes de sabotage et de plastiquage de sa maison et des menaces à l'encontre de sa famille se multiplient. Les appels au meurtre se font insistants : certains articles de journaux de Tunis, Casablanca et Alger appellent « à frapper Farhat Hached nommément à la tête ».
Le 28 novembre, on peut lire dans l'hebdomadaire nord-africain Paris dirigé par Camille Aymard :

« Avec Ferhat Hached et Bourguiba, nous vous avons présenté deux des principaux coupables. Nous en démasquerons d'autres, s'il est nécessaire, tous les autres, si haut placés soient-ils. Il faut, en effet, en finir avec ce jeu ridicule qui consiste à ne parler que des exécutants, à ne châtier que les « lampistes » du crime, alors que les vrais coupables sont connus et que leurs noms sont sur toutes les lèvres. Oui, il faut en finir, car il y va de la vie des Français, de l'honneur et du prestige de la France. « Si un homme menace de te tuer, frappe-le à la tête » dit un proverbe syrien. C'est là qu'il faut frapper aujourd'hui. Tant que vous n'aurez pas accompli ce geste viril, ce geste libérateur, vous n'aurez pas rempli votre devoir et, devant Dieu qui vous regarde, le sang des innocents retombera sur vous[3]. »

Au matin du 5 décembre 1952, une opération de guet-apens est exécutée pour éliminer Hached. Une première voiture le suit, à la sortie de Radès, ville de la banlieue sud de Tunis où il habite. Des rafales de mitraillettes sont tirées de la voiture qui s'enfuit à toute allure. Blessé à l'épaule et à la main, Hached trouve la force de quitter sa voiture.

Quelques instants plus tard, une deuxième voiture apparaît avec trois hommes à bord ; s'apercevant qu'il vit encore, ils s'en approchent et l'achèvent d'une balle dans la tête avant de le jeter à moins d'un kilomètre au bord de la route.

À midi, la radio annonce sa mort qui provoque un soulèvement dans tout le pays ainsi que des manifestations à Casablanca[4], au Caire, à Damas, à Beyrouth, à Karachi, à Jakarta, à Milan, à Bruxelles et à Stockholm. Le journal socialiste Nord-Matin titre dans son numéro 2572 : « Émeutes sanglantes à Casablanca. 40 morts et nombreux blessés.  
Après l'assassinat de Farhat Hached et les maladresses du résident, les troubles s'étendent à l'Algérie et au Maroc ». Plusieurs personnalités françaises dénoncent cet assassinat au travers de leurs articles, de leurs déclarations, de leurs pétitions ou de leurs démarches, tels Daniel Guérin, Roger Stéphane, Claude Bourdet, David Rousset, René Louzon, Alain Savary ou Charles-André Julien.

Après sa mort, l'enquête judiciaire se perd dans des instructions successives accompagnées de propagandes, fausses pistes et diffamations diverses. Selon une note de G. Lewis Jones, consul général des États-Unis à Tunis[6] :
« L'enquête judiciaire, toutefois, est toujours en cours sous ce que les journaux appellent un « black-out complet ». Divers témoins se seraient retirés dont le chauffeur de l'une des « voitures de la mort ». Néanmoins, un doute considérable est exprimé sur le dernier point. Cela semble être la politique actuelle de la résidence, maintenant que l'ordre est apparemment donné, de laisser graduellement plus de marge à la presse dans le but de contrecarrer les premières impressions malheureuses qu'il y ait eu quelque chose de mystérieux et de scélérat dans la manipulation française du cas. »
En 1955, le dossier Hached est officiellement clos sur le plan juridique sans avoir déterminé avec certitude les coupables de l'assassinat.

Le 2 décembre 2012 à Radès, le fils du fondateur de l'UGTT, Noureddine Hached, parle des circonstances de l'assassinat de son père après soixante ans et souligne que le projet pour lequel ce dernier a sacrifié sa vie est encore vivant en faisant référence à l'UGTT.
 Il indique que l'enquête judiciaire sur le meurtre de son père se poursuit malgré que la justice française ait décidé de classer l'affaire[7].

Plusieurs théories circulent alors sur les commanditaires de son assassinat : un Français agissant seul, des rivaux politiques, des camarades souhaitant donner une dimension tragique à la question tunisienne aux Nations unies, un complot communiste en raison de sa proximité avec les Américains, des officiels français.

De nos jours, l'État français maintient la version selon laquelle Hached a été assassiné par des colons extrémistes.

Cependant, c'est la piste du complot d'État qui reste privilégiée : les autorités du protectorat, en connivence et sous l'influence directe de colons radicaux, auraient planifié et organisé cet assassinat selon Charles-André Julien[8].

Les membres du gouvernement français apparaissent comme ayant été directement impliqués dans la prise de décision afin de gérer le « cas Farhat Hached ». Selon Juliette Bessis, « le crime a été organisé très haut.

 Je dis : l'armée, la politique, la police »[9]. L'équipe chargée d'assassiner Hached aurait été composée de policiers en activité, de jeunes colons et de truands notoires selon Antoine Méléro, ancien membre de La Main rouge[10].

 Selon lui, « Hached a bien été assassiné par la Main rouge qui avait reçu l'ordre de le faire.
La Main rouge était une organisation dont l'État français se servait pour ne pas se mouiller.

 De toute façon, il fallait se débarrasser de Hached, d'une façon ou d'une autre »[9]. Pour Jean Baklouti, ancien fonctionnaire de la DST à Tunis, La Main rouge était en effet « une nébuleuse de policiers français et de gros colons couverte par les services d'action du renseignement français »[9].

Dans un documentaire diffusé le 18 décembre 2009 sur la chaîne d'Al Jazeera Documentary Channel, un ancien agent des services secrets français, Antoine Méléro, approuve cet assassinat

 Source : Encyclopédie Universelle Wikipédia.
http://latunisiededina.blogspot.com/




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